Le 4 octobre dernier, le monde entier a été impacté par un énième bug technique du Groupe Facebook. Cette panne générale a privé durant plusieurs heures, les usagers des plateformes Facebook, Messenger, Whatshapp et Instagram. Les professionnels des métiers de la communication n’ont pas été épargnés par cette situation. C’est dans ce cadre que nous vous proposons une mini-série de prise de paroles croisées d’experts sur ce sujet.

Dans ce deuxième épisode, Anne Massok stratège en communication et fondatrice de l’agence de relations publics digitales MAEK, en compagnie de Toba Tanama, spécialiste entre autres de la communication politique et institutionnelle, nous livrent leurs impressions et leurs analyses sur cette situation.

Q.1 : Avez-vous été affecté(e) dans le cadre de votre travail (en interne, comme en externe) par la panne informatique mondiale, qu’a connu le Groupe Facebook (Facebook, Instagram, Messenger, Whatsapp) le 04/10/21 ? Que vous inspire cette situation ?

Anne Massok: Nous n’avons pas été affectés par la panne informatique mondiale. Un constat s’est posé au sujet des plateformes collaboratives plus appréciées par la majorité des salariés, que l’échange intempestif de mails et les réunions. La plateforme Slack que nous utilisons est largement plébiscitée par au moins 78% des décideurs IT (selon les dernières données de l’entreprise basée à San Francisco ndlr), affirmant qu’ils continueront de l’utiliser, ou d’autres logiciels, après le retour aux conditions normales de travail. Il me semble d’ailleurs qu’à défaut de pouvoir aller frapper à la porte d’un collègue (notamment en conditions de télétravail), les plateformes collaboratives améliorent la cohésion entre les membres d’une équipe, tout en renforçant la productivité.

Toutefois, cette situation m’inspire tout de même de l’inquiétude et motive la réflexion sur l’importance des interactions entre individus, l’investissement et la formation des équipes à l’utilisation des meilleurs logiciels opérationnels, à l’adaptabilité aux changements et à la collaboration avec les clients.

Quand on repense à la panne d’envergure mondiale qui s’est produite en juin 2021, et qui a touché de nombreux sites Internet, dont ceux du « Monde », d’Amazon, de très nombreux sites de grands médias ou celui de la Maison Blanche et du gouvernement britannique (qui ont été temporairement bloqués), il faut en tirer certaines conclusions. Tout le monde est vulnérable face à la technologie. Ce qui en soit tend à me rendre un peu nerveuse. La sécurité du BIG DATA, une problématique qui est maintenant bien présente dans mon esprit, notamment par soucis de gestion de l’information critique de nos clients.

Toba Tanama: Personnellement, je n’ai pas été affecté par cette panne. Depuis le dernier bug de WhatsApp, au moment où j’étais encore aux affaires, de Kigali où je séjournais dans le cadre d’une mission officielle, j’avais vite fait de faire switcher mes équipes et nos cibles sur d’autres réseaux sociaux. Donc, je savais que cette situation pouvait se reproduire. Par contre, comme tout citoyen lambda (le simple citoyen, l’étudiant, le commerçant, le l’entrepreneur, le fonctionnaire) l’on peut dire qu’on le ressent. Nous avons été affectés surtout dans le monde du travail et de l’entreprise où l’essentiel de nos actions quotidiennes et de notre interaction passe par les réflexes induits et les opportunités offertes par WhatsApp, Facebook.

Q.2 : Quelles ont été les répercussions dans votre dynamique de travail ainsi que sur le traitement des urgences de vos clients/collaborateurs ?

Anne Massok: Les répercussions dans notre dynamique de travail ont été plutôt positives. Remettre en question le fonctionnement de son entreprise, sur le plan de la communication et du lien social, encourage à nourrir une réflexion profonde sur la place (disproportionnée ?) des réseaux sociaux dans la vie privée et professionnelle. Comme beaucoup, j’ai été frappée de constater la force du désarroi généré par ce black-out, qui nous oblige à affronter la dérangeante question de notre rapport à ces plateformes. Il me semble cependant qu’il ne faut pas dramatiser l’impact de la disruption de ces moyens de communication, qui n’ont pour seul véritable pouvoir contrôlant (plutôt qu’addictif) que celui de nous gaver compulsivement d’informations extérieures. Si nous avions souffert d’une panne d’électricité, le résultat aurait été le même. Voire pire.

Toba Tanama: Les répercussions sont diverses et énormes. Que ce soit au niveau du travail de chacun proprement dit, de la gestion du temps, du partage des rôles, de la diffusion de contenus et du traitement des urgences; tout a tourné au ralenti avec les conséquences qui vont avec. Parceque même si vous êtes présents sur d’autres réseaux, encore faudrait-il que vos interlocuteurs le soient. Je n’ais par exemple pas pu avoir accès à des documents. Des clients ont pu difficilement être joints. Des corrections n’ont pu être faites à temps et donc des commandes non honorés. Bien avant et surtout avec la crise sanitaire, nous avons intégré, les réseaux sociaux parmi les principaux canaux d’échanges avec les collaborateurs et les partenaires. Parce que c’est plus rapide. Le social média engage, fédère et professionnalise l’activité en entreprise.

Q.3 : Quelles sont les voies de contournement que vous avez déployées pour avancer dans vos activités ?

Anne Massok: Principalement une bonne vieille ligne téléphonique fixe a suffit à rassurer. Je suppose que par précaution je descendrai du grenier mon fax.

Le moment venu également pour des startups africaines créatrices de plateformes sociales et de communication de promouvoir davantage leurs offres et de proposer d’autres applications collaboratives en adéquation avec les besoins des utilisateurs professionnels finaux centrés sur l’Afrique. Je pense notamment à IT KOLA ou encore à Mbuntu, Masolo, etc. Gagner du temps éliminer les obstacles à la communication favoriser les relations humaines et l’interaction… Ces applications « nouvelle génération » pourrait répondre de façon satisfaisante au choix d’une approche logicielle best-of-breed consistant à choisir les outils les mieux adaptés, plutôt que d’adopter une suite logicielle « tout-intégré ».

Toba Tanama: Puisque l’Internet en lui-même n’est pas coupé, plusieurs alternatives ont été trouvées. Nous avons effectué une migration rapide vers d’autres plate-formes telles que Twitter, Télégram, LinkedIn et même YouTube où l’intensification n’était pas, certes la même. C’est aussi le recours aux mails. Comme on a pu le voir au courant de cette journée-là, le recours aux SMS a été rapide avec un renforcement de la disponibilité physique. Le digital n’est qu’un terrain de jeu, un espace de déploiement.

La rédaction.